Région Bourgogne-Franche-Comté : sûreté nucléaire et radioprotection en 2024
En 2024, le niveau de la sûreté nucléaire et de la radioprotection reste globalement satisfaisant
À l’occasion de la parution du rapport sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection dans la région Bourgogne-Franche-Comté, l’ASNR présente les conclusions des actions de contrôle qu’elle a menées tout au long de l’année 2024 en région Bourgogne-Franche-Comté1.
Ce qu’il faut retenir pour la région Bourgogne-Franche-Comté
En 2024, l’ASN a réalisé 70 inspections dans la région Bourgogne-Franche-Comté, dont 10 dans le domaine de la sûreté nucléaire, 56 dans le nucléaire de proximité, 4 dans le domaine du transport de substances radioactives (TSR).
En 2024, un événement significatif classé au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (échelle INES) a été déclaré à l’ASNR Dijon dans le secteur médical. Par ailleurs, un événement significatif a été classé au niveau 2 de l’échelle ASN‑SFRO (échelle spécifique pour les événements de radioprotection affectant des patients dans le cadre d’une procédure de radiothérapie).
Le contrôle du domaine médical
En 2024, la radioprotection dans le domaine médical reste globalement satisfaisante, bien que plusieurs signaux faibles appellent à la vigilance. Des tensions sur les effectifs (manipulateur en électroradiologie médicale, physiciens médicaux, médecins), une externalisation mal encadrée de certaines missions (notamment en imagerie médicale), ainsi qu’une progression rapide de la télé radiologie contribuent à une complexification des organisations de soins et à une dilution des responsabilités.
Fait marquant
L’année 2024 confirme par ailleurs une accélération de l’innovation dans les traitements utilisant les rayonnements ionisants, avec notamment l’émergence de nouveaux produits radioactifs pour la radiothérapie interne vectorisée (RIV). Ces évolutions appellent une adaptation rapide du système de soins pour garantir une prise en charge sécurisée.
L’appropriation des enjeux de radioprotection sur l’ensemble de la chaîne depuis la conception jusqu’à la gestion des déchets et effluents est indispensable, tout particulièrement dans l’accompagnement de l’innovation, et constitue un sujet de vigilance pour l’ASNR.
En radiothérapie et curiethérapie :
En radiothérapie, les fondamentaux de sécurité sont en place, mais le retour d’expérience s’essouffle : les comités internes se réunissent moins fréquemment, les analyses d’événements significatifs (ESR) restent souvent superficielles, et l’évaluation de l’efficacité des actions correctives est encore insuffisante. La répétition d’erreurs, notamment de latéralité, de délinéation ou de positionnement, ainsi que l’augmentation des re-irradiations, illustrent la nécessité d’une actualisation plus rigoureuse des analyses de risques en amont de tout changement technique ou organisationnel, et d’un meilleur usage du retour d’expérience, qu’il soit local ou national.
En curiethérapie, la radioprotection est bien prise en compte bien que la sécurisation des sources de haute activité et le maintien des compétences nécessitent une vigilance accrue. Si des progrès sont constatés, le niveau de conformité attendu n’est pas encore atteint.
Les 5 inspections conduites en 2024 dans la région ont mis en évidence des besoins communs d’amélioration : une revue documentaire plus régulière, en phase avec les évolutions réglementaires et techniques ; une meilleure formalisation et extension de la formation et de l’habilitation à tous les professionnels concernés ; enfin, pour l’établissement ayant déclaré un événement classé niveau 2 sur l’échelle ASN-SFRO, des ajustements notables ont été engagés pour améliorer les démarches d’évaluation des risques a priori et d’analyse des événements indésirables.
En médecine nucléaire :
Si les pratiques sont globalement conformes, pour les patients, notamment grâce à une utilisation pertinente des niveaux de référence diagnostiques (NRD), des améliorations sont attendues sur le déploiement des systèmes de management de la qualité, l’analyse des événements significatifs de radioprotection (ESR), ainsi que la formation continue. L’ASN a élaboré en 2024, en lien avec les professionnels, une fiche portant sur les complications observées avec l’yttrium-90.
D’autre part, des points de vigilance ont été identifiés sur le suivi des traitements au lutétium-177 (risque d’extravasation) et sur la gestion des effluents et déchets produits par les patients, dans un contexte d’émergence de nouveaux radiopharmaceutiques administrés en ambulatoire.
Les 6 inspections menées en 2024 dans la région ont confirmé la qualité de la radioprotection des travailleurs et du contrôle des sources et équipements, ce qui constitue un point fort régional. Elles ont toutefois mis en lumière des retards dans la mise en œuvre des exigences relatives à l’assurance qualité en imagerie médicale.
Dans le domaine des pratiques interventionnelles radioguidées :
Des non-conformités persistent, notamment sur le non-respect des règles d’aménagement des installations, l’insuffisance de formation à la radioprotection des travailleurs et patients, ainsi qu’un défaut de coordination des mesures de prévention lors de l’intervention d’entreprises extérieures.
Le recours croissant à des organismes externes (OCR) mal encadrés conduit à une dilution des responsabilités des responsables d’activités nucléaires (RAN) et une moindre appropriation, voir une dégradation, de la radioprotection. Enfin, une méconnaissance des obligations réglementaires est observée chez les praticiens libéraux employeurs.
Les 6 inspections menées en 2024 dans la région ont mis en évidence une bonne pratique liée à la mise en place d’audits sur le port des dispositifs de dosimétrie, ainsi qu’un bon usage des niveaux de référence diagnostiques (NRD) à des fins d’optimisation de l’exposition des patients.
Le contrôle du domaine industriel
Ces secteurs présentent une grande diversité d’activités, d’établissements et d’applications. En matière de radioprotection, l’appréciation de l’ASN reste globalement satisfaisante mais contrastée, dans la continuité des années précédentes. En particulier, l’ASN note un maintien global des efforts mais des écarts persistants selon les secteurs, les structures et les ressources consacrées.
En radiographie industrielle :
En 2024, la radiographie industrielle, en particulier la gammagraphie, est restée un secteur prioritaire pour l’ASN. Le respect des obligations réglementaires, comme l’organisation de la radioprotection, la formation et le suivi dosimétrique des travailleurs, la manipulation et la maintenance des appareils, par les entreprises est à relever. Toutefois, des failles dans la coordination entre donneurs d’ordre et entreprises sont à noter.
Par ailleurs, l’ASNR recommande de privilégier les opérations en casemate afin de réduire les risques, notamment en cas d’incident empêchant le retour de la source radioactive en position de sécurité.
Les 11 inspections menées en 2024 dans la région ont montré que les vérifications exigées dans le code du travail et la signalisation sur les zones de chantiers étaient satisfaisantes. Une vigilance particulière doit être portée aux incidents raisonnablement prévisibles.
La protection des sources de rayonnement contre des actes de malveillance
La mise en place des dispositions pour protéger des sources radioactives de haute activité ou des lots de sources équivalents se poursuit progressivement. L’ASN note que la très grande majorité des établissements procède à la catégorisation des sources. Par ailleurs, ces derniers définissent correctement leur politique de protection des sources ainsi que les dispositions. En revanche, des progrès doivent être réalisés sur la justification que les barrières physiques apportent une résistance à l’effraction suffisante, ainsi que sur la définition d’un programme de maintenance préventive des équipements destinés à détecter des intrusions.
Les 6 inspections menées en 2024 dans la région ont montré que la délivrance des autorisations nominatives d’accès aux sources, ainsi que l’identification et la protection des informations sensibles et l’identification des barrières physiques protégeant les sources sont bien mise en œuvre, ce qui constitue un point fort régional. Des points d’amélioration sur l’organisation en cas de détection de franchissement non autorisé d’une barrière demeurent cependant.
La prévention du risque lié au radon
En 2024, l’ASN a mené en Bourgogne-Franche-Comté sept inspections ciblant la gestion du risque radon dans les établissements recevant du public (ERP) et les lieux de travail. Cinq d’entre elles ont porté sur des communautés de communes et des barrages hydrauliques de l’État pour lesquels, si la réglementation était initialement mal connue, toutes les actions requises ont été engagées. Deux inspections ont également concerné des établissements thermaux pour lesquels l’application de la réglementation se poursuit, avec notamment des travaux efficaces réalisées sur les circuits d’eau pour réduire les concentrations en radon dans la partie ERP.
L’ASNR soutient le réseau régional « Eclaireurs » qui, sur la thématique du radon et la qualité de l’air intérieur dans les bâtiments, informe et sensibilise, relaye les formations disponibles, met en lien les partenaires et facilite la co-construction d’actions en Bourgogne-Franche-Comté. En 2024, l’ASN a contribué à un webinaire sur la gestion du risque lié au radon en partenariat avec l’Agence Régional de la Santé et la Direction Général du Travail.