Région Grand Est : sûreté nucléaire et radioprotection en 2024

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  • Communiqué de presse

19/06/2025

En 2024, le niveau de la sûreté nucléaire et de la radioprotection reste globalement satisfaisant

À l’occasion de la parution du rapport sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection dans la région Grand Est, les divisions de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne présentent conjointement les conclusions des actions de contrôle qu’elles ont menées tout au long de l’année 2024 en région Grand Est.


Ce qu’il faut retenir pour la région Grand Est

En 2024, les divisions de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne ont mené 164 inspections dans la région Grand Est, dont 62 dans les centrales nucléaires en exploitation, 10 dans les installations de stockage de déchets radioactifs et sur les sites des centrales nucléaires de Fessenheim et de Chooz A en démantèlement, 81 dans le domaine du nucléaire de proximité, 5 concernant le transport de substances radioactives et 6 concernant des organismes ou laboratoires agréés.

Les divisions de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne ont par ailleurs réalisé 15 journées d’inspection du travail dans les centrales nucléaires.

Au cours de l’année 2024, trois événements significatifs déclarés par les exploitants des installations nucléaires de la région Grand Est ont été classés au niveau 1 sur l’échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (échelle INES).

Dans le domaine du nucléaire de proximité, deux événements significatifs ont été classés au niveau 1 de l’échelle INES (un dans le domaine industriel et un dans le domaine médical) et trois événements significatifs concernant des patients ont été classés au niveau 1 de l’échelle ASN-SFRO.

Enfin, dans le cadre de leurs missions de contrôle, les inspecteurs de l’ASNR ont été amenés à effectuer un signalement en application de l’article 40 du code de procédure pénale, pour des suspicions de falsification dans une installation fabriquant des équipements à destination des installations nucléaires.


Le contrôle des centrales nucléaires de production d’électricité exploitées par EDF (Cattenom, Chooz B et Nogent-sur-Seine en fonctionnement, Chooz A et Fessenheim en démantèlement)

Centrale nucléaire de Cattenom

L’ASNR considère que les performances de la centrale de Cattenom se distinguent favorablement en matière de sûreté nucléaire, avec cependant des faiblesses en matière de surveillance des installations.

Les performances en maintenance sont restées satisfaisantes, grâce à une bonne organisation des interventions, une maîtrise du planning et une anticipation efficace des aléas.

La prévention du risque incendie, jusque-là en retrait, est en amélioration en 2024, en particulier sur la maîtrise des charges calorifiques ; l’incendie survenu hors zone contrôlée en juin 2024, à l’origine du déclenchement d’un plan d’urgence interne, a été géré efficacement.

En matière d’environnement, les progrès se confirment sur le confinement liquide et les installations de déshuilage, en revanche la consommation de produits biocides reste encore élevée. En radioprotection, si des avancées sont notées sur la gestion des contrôles radiographiques, des efforts sont encore attendus sur la maîtrise de la contamination. Enfin, plusieurs événements de sécurité au travail ont mis en évidence un besoin de renforcement de l’évaluation des risques lors de la préparation des chantiers.

Centrale nucléaire de Chooz B

L’ASNR considère que les performances de la centrale de Chooz B en matière de sûreté nucléaire et de protection de l’environnement rejoignent l’appréciation générale portée sur les centrales nucléaires d’EDF, et qu’elles se distinguent favorablement dans le domaine de la radioprotection.

En matière d’exploitation des installations, des progrès sont attendus concernant la gestion des mises en configuration des circuits et le strict respect des documents de conduite des réacteurs. Concernant la maintenance, la gestion des arrêts pour rechargement du combustible a été satisfaisante. Des axes de progrès ont en revanche été identifiés concernant la maintenance des générateurs de vapeur et le suivi des équipements sous pression nucléaires.

Dans le domaine de la radioprotection, la propreté des installations est jugée satisfaisante et le site est en progrès. Des efforts sont toutefois attendus concernant la culture de radioprotection et la maîtrise du risque de contamination. S’agissant de la protection de l’environnement, l’organisation reste satisfaisante, bien que des lacunes ponctuelles aient été observées dans la gestion des effluents.

Réacteur en démantèlement de Chooz A 

L’ASNR juge satisfaisantes les performances du réacteur en démantèlement de Chooz A dans les domaines de la sûreté nucléaire, de la protection de l’environnement et de la radioprotection.

En 2024, les activités ont été principalement consacrées à la préparation de la levée de la cuve du réacteur, prévue en 2025. Les actions engagées ces dernières années dans le domaine de la radioprotection sont de nature à faire progresser le niveau du site, même si des efforts restent à poursuivre pour réduire le nombre de contaminations internes sur les chantiers.

Centrale nucléaire de Fessenheim 

L’ASNR considère que les préparatifs au démantèlement de la centrale de Fessenheim se poursuivent de manière sérieuse et conforme aux plannings.

L’année 2024 a été marquée par la tenue de l’enquête publique sur le dossier de démantèlement. Les activités préparatoires au démantèlement se sont déroulées de façon satisfaisante et conformément aux plannings prévus, avec notamment la finalisation des travaux de transformation de la salle des machines en une zone de gestion et d’entreposage des déchets radioactifs et la préparation au transport des générateurs de vapeur vers le site de traitement Cyclife en Suède. Les performances en radioprotection sont jugées globalement satisfaisantes.

Centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine

L’ASNR estime que les performances de la centrale de Nogent-sur-Seine rejoignent l’appréciation générale portée sur les centrales nucléaires d’EDF en matière de sûreté nucléaire, de protection de l’environnement et de radioprotection.

Concernant l’exploitation des installations, l’ASNR note une amélioration notable dans la gestion des consignations de matériels et des condamnations administratives, tout en soulignant un besoin d’amélioration dans la gestion des situations fortuites en salle de commande. Concernant la maintenance, les opérations se sont déroulées de manière satisfaisante durant l’arrêt du réacteur 2 pour rechargement du combustible.

Dans le domaine de la radioprotection, malgré de bons résultats concernant la propreté radiologique des chantiers, des écarts notables ont été relevés, notamment dans la gestion des sas d’accès aux chantiers de maintenance et dans l’entretien et le suivi des appareils de mesure de la radioactivité. Des progrès restent en outre à réaliser concernant la culture de radioprotection des intervenants. S’agissant de la protection de l’environnement, bien que la thématique soit mieux prise en compte, des améliorations restent attendues dans la gestion des rejets et du confinement des pollutions liquides.

Autres installations nucléaires

Centre de stockage de l’Aube

L’ASNR considère que le Centre de stockage de l’Aube est exploité dans des conditions satisfaisantes en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et de protection de l’environnement.

Les inspections réalisées en 2024 ont relevé la robustesse du référentiel qualité relatif à la surveillance de l’environnement, ainsi qu’une organisation maîtrisée et adaptée aux enjeux pour le choix et la surveillance des prestataires.

Projet Cigéo

L’ASNR a poursuivi l’instruction technique de la demande d’autorisation de création (DAC) du projet Cigéo, que l’Andra a déposée le 16 janvier 2023 auprès de la ministre en charge de la sûreté nucléaire.
Ce processus d’instruction technique s’étend sur une durée prévisionnelle de trois ans, en étant jalonné de trois réunions du groupe permanent d’experts de l’ASNR pour les déchets, correspondant aux trois thématiques autour desquelles l’instruction technique s’articule :

  • les données de base retenues pour l’évaluation de sûreté de Cigéo ;
  • la sûreté en phase d’exploitation des installations de surface et souterraines ;
  • la sûreté à long terme après la fermeture.

Un processus de concertation inédit a été mis en œuvre autour du processus d’instruction technique. Une vingtaine d’organisations ont ainsi été consultées préalablement à chaque saisine du groupe permanent d’experts, afin de prendre en compte leurs attentes et préoccupations dans le cadrage de l’instruction technique.

Le groupe permanent d’experts pour les déchets a déjà examiné, en avril et en décembre 2024, les deux premiers groupements thématiques. Les recommandations qui en résultent ont fait l’objet de demandes complémentaires de l’ASNR adressées à l’Andra. Le même processus est appliqué pour l’analyse de la dernière thématique, qui sera examinée fin juin 2025 par le groupe permanent d’experts.

Les recommandations et positions du groupe permanent d’experts pour les déchets qui ont été - ou seront – formulées contribueront à fonder l’avis que l’ASNR rendra sur la demande d’autorisation de création. Cet avis devrait être rendu durant l’automne 2025, ce qui permettra le lancement de la phase de consultation.

Domaine médical

En 2024, la radioprotection dans le domaine médical reste globalement satisfaisante, bien que plusieurs signaux faibles appellent à la vigilance. Des tensions sur les effectifs (MERM, physiciens médicaux, médecins), une externalisation mal encadrée de certaines missions (notamment en imagerie), ainsi qu’une progression rapide de la téléradiologie contribuent à une complexification des organisations de soins et à une dilution des responsabilités.

L’année 2024 confirme par ailleurs la forte dynamique d’innovation médicale au niveau national (notamment en radiothérapie et médecine nucléaire), qui présente des bénéfices importants mais aussi des enjeux nouveaux (identification des risques, gestion des déchets, évolutions des procédures, …).

En radiothérapie, les fondamentaux de sécurité sont en place mais les démarches de retour d’expérience s’essoufflent. La répétition d’erreurs de cibles souligne la nécessité de redonner du sens à ces démarches et le besoin d’actualiser les analyses de risques.

En curiethérapie, la radioprotection reste maîtrisée, bien que la sécurisation des sources de haute activité et le maintien des compétences nécessitent une vigilance accrue.

En médecine nucléaire, si les pratiques sont globalement correctes, des améliorations sont attendues sur la gestion des déchets, la sécurisation des processus d’administration des médicaments, ainsi que la formation continue des professionnels.

Des non-conformités persistent dans les pratiques interventionnelles radioguidées, notamment sur les règles techniques d’aménagement des installations, la formation à la radioprotection et la coordination avec les prestataires.

Domaines industriel, vétérinaire et de la recherche

Ces secteurs présentent une grande diversité d’activités, d’établissements et d’applications. En matière de radioprotection, l’appréciation de l’ASNR reste contrastée, dans la continuité des années précédentes. En particulier, l’ASNR note un maintien global des efforts mais des écarts persistants selon les secteurs, la maturité des structures et les ressources consacrées.

Concernant les laboratoires de recherche, le niveau de radioprotection est jugé globalement satisfaisant. Les conditions d’entreposage et d’élimination des sources scellées en fin de vie, des déchets et des effluents radioactifs constituent les principales difficultés rencontrées par les établissements de recherche.

Dans le domaine de la radiographie industrielle, l’ASNR constate que les entreprises ont, dans leur grande majorité, maintenu la rigueur nécessaire pour respecter les obligations réglementaires en matière de radioprotection.
Néanmoins, l’ASNR juge toujours préoccupantes les faiblesses récurrentes en matière de signalisation de la zone d’opération lors des chantiers. Elle souligne que le manque de préparation et de coopération, en amont des chantiers, entre les donneurs d’ordre et les entreprises de radiographie est une des causes de ces écarts. L’ASNR estime, plus généralement, que les donneurs d’ordre devraient privilégier, lorsque c’est possible, les prestations de radiographie industrielle dans des casemates et non sur chantier.

Fait marquant

Perte de contrôle d’une source de gammagraphie à Colmar avec des conséquences à l’extérieur du site.
Le 10 avril 2024 lors d’une opération de radiographie industrielle, les opérateurs n’ont pas été en mesure de ramener la source radioactive d’iridium-192 dans sa position de sécurité, à la suite du premier contrôle radiographique. Un débit de dose ambiant important a conduit à l’évacuation des entreprises et des habitations riveraines pendant une journée (une décision extrêmement rare, les événements de perte de contrôle de source de gammagraphie n’ayant généralement aucun impact pour le public).
Le lendemain, une intervention du fabricant de l’appareil de gammagraphie, des pompiers et de la sécurité civile a conduit à la réduction du débit de dose environnant, ce qui a permis de réduire considérablement la zone d’évacuation (à l’intérieur des limites du site de l’entreprise) et de lever l’ordre d’évacuation. Lors d’une intervention ultérieure, le fabricant a pu récupérer le contrôle de la source de gammagraphie et l’évacuer.

Pour plus d’informations sur l’événement, consulter la note d’information et son complément, publiés par l’ASNR sur son site internet.


Les divisions de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne assurent la mise en œuvre des missions de contrôle sur le terrain pour toutes les installations et activités nucléaires civiles en région Grand Est. Elles instruisent les demandes d’autorisation, vérifient la conformité à la réglementation relative à la sûreté nucléaire, à la radioprotection, à la gestion des équipements sous pression ainsi qu’à la protection de l’environnement. Elles assurent également l’inspection du travail dans les centrales nucléaires.

En cas de situation d’urgence radiologique, elles assistent les préfets dans la protection des populations. Elles participent en outre à la préparation des plans d'urgence. Les divisions de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne sont aussi actives dans l’information du public, notamment via les Commissions locales d’information (CLI), et entretiennent des liens avec les médias, élus, associations, exploitants et autorités locales.