Explications sur l'avis de l'ASNR relatif à la demande d’autorisation de création de Cigéo
Qu’est-ce que le projet Cigéo ?
Cigéo est le projet de centre de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde développé par l’Andra[1].
Pour en savoir plus, une présentation détaillée figure sur le site de l’ASNR :
Pour quels déchets a-t-il été conçu ?
Conformément aux termes de la loi du 28 juin 2006, Cigéo est conçu et dimensionné pour stocker les déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue (HA-MAVL) de son « inventaire de référence ».
En effet, l’ANDRA s’est fondé sur un « inventaire de référence » pour mener les études et recherches relatives à la conception de Cigéo ; celui-ci comprend les déchets déjà produits ainsi que ceux qui seront produits par les installations nucléaires en exploitation ou autorisées à fin 2016. L’ASNR considère que cet inventaire de référence constitue une base robuste pour définir l’inventaire des déchets autorisés à être stockés dans Cigéo. Les informations fournies par l’Andra concernant l'inventaire « de réserve » sont globalement suffisantes pour alimenter les études d'adaptabilité de Cigéo aux scénarios industriels prospectifs retenus. L’inventaire de réserve tel que pris en compte par l’Andra dans la mise à jour de son dossier tient notamment compte d’un fonctionnement de 60 ans des réacteurs du parc actuel et de six nouveaux réacteurs EPR2.
Quelle est la suite de la procédure ?
L’autorisation de création doit faire l’objet d’un décret pris en Conseil d’Etat. Avant sa publication, des consultations réglementaires et une enquête publique sont nécessaires. L’avis de l’ASNR accompagnera le dossier mis à disposition du public lors de l’enquête publique, afin de l’éclairer sur les enjeux techniques relatifs à la sûreté de Cigéo.
Le présent avis présente également les éléments que l’ASNR estime nécessaires en vue de la mise à jour du dossier prévue avant l’enquête publique, et les éléments attendus aux étapes ultérieures du développement du projet Cigéo.
Dans l’hypothèse de la délivrance du décret d’autorisation de création de l’installation, l’ASNR édictera les prescriptions techniques que l’Andra devra respecter.
Eu égard à la nécessité de compléter le dossier sur certains aspects avant le franchissement de certains jalons du projet, la transmission de certains éléments, pour la plupart desquels l’Andra a pris un engagement, pourront faire l’objet de prescriptions ou de points d’arrêt de de l’ASNR.
La mise en service de l’installation, limitée à la phase industrielle pilote, nécessitera elle-même une autorisation de l’ASNR, et sa mise en service complète ne pourra être autorisée qu’à l’issue du bilan de la phase industrielle pilote et de la mise à jour des dispositions législatives relatives à l’exigence de réversibilité.
L’ASNR est en charge de délivrer l’autorisation de mise en service des installations nucléaires de base. Dans le cas de Cigéo, la première autorisation de mise en service ne concernera que la phase industrielle pilote.
La phase industrielle pilote
La phase industrielle pilote a été introduite juridiquement à l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement, à la suite du débat public mené en 2013 sur le projet Cigéo. Cette première phase du développement du projet Cigéo aura pour objectif de tester progressivement, en conditions réelles, les fonctionnalités techniques et opérationnelles de Cigéo. Elle vise à conforter le caractère réversible et la démonstration de sûreté de l'installation, notamment par un programme d'essais in situ.
Que dit l’avis de l’ASNR ?
De façon générale, l’ASNR estime que la démonstration de sûreté présentée dans le dossier de demande d’autorisation de création de Cigéo, pour les phases d’exploitation et d’après fermeture, est conforme aux attendus pour une demande d’autorisation de création d’un centre de stockage géologique.
S’agissant de l’évaluation de la sûreté en exploitation, la démonstration de la maîtrise des risques internes d’origine nucléaire (dont notamment l’inondation interne, la manutention et la coactivité) et des risques d’agression externe, les spécifications d’acceptation des colis et les principes de conception et de dimensionnement du génie civil ont atteint un niveau de maturité conforme aux attendus au stade d’une demande d’autorisation de création. En termes d’adaptabilité, aucun point rédhibitoire n’a été identifié concernant le stockage éventuel des combustibles usés dans l’hypothèse où ils ne seraient pas retraités, et des déchets FA-VL[2] dans l’hypothèse où aucune autre filière dédiée ne serait disponible pour leur stockage.
S’agissant de l’évaluation de sûreté post-fermeture, les domaines relatifs à la démarche d’évaluation de la sûreté après fermeture, à l’analyse des risques et des incertitudes associés à l’évolution du stockage, aux impacts environnementaux (radiologiques et chimiques) et aux impacts sanitaires chimiques, qui s’avèrent très faibles, ont également atteint un niveau de maturité conforme aux attendus au stade d’une demande d’autorisation de création. Par ailleurs, aucun point rédhibitoire lié à la sûreté après fermeture du stockage de l’inventaire de réserve n’a été identifié et l’ASNR note que le système de stockage, dans l’architecture retenue à ce stade, présente une bonne capacité de confinement en après-fermeture, et est robuste vis-à-vis des événements perturbateurs considérés et des incertitudes identifiées.
L’ASNR considère cependant que des compléments et éléments de consolidation seront nécessaires à l’acquisition complète de la démonstration de sûreté pour certaines composantes du projet, dont certaines doivent pouvoir bénéficier de la phase industrielle pilote. Ces compléments et éléments de consolidation ne constituent pas des points rédhibitoires à la délivrance d’un décret d’autorisation de création. En effet, l’ASNR estime que le contenu de la version préliminaire du rapport de sûreté soumis par l’Andra comprend les éléments requis par la réglementation, avec un niveau de détail suffisant, permettant d’avoir la raisonnable assurance que la démonstration de sûreté nucléaire sera confirmée au moment de la remise de la version du rapport de sûreté établie pour la demande d’autorisation de mise en service de Cigéo, qui sera limitée à la phase industrielle pilote. Ces compléments concernent notamment :
- la corrosion des matériaux métalliques des alvéoles de stockage HA[3] ;
- les ouvrages de scellement, en particulier leur conception détaillée, leur nombre, et leur localisation au sein de Cigéo ;
- les risques liés à l’explosion pour les alvéoles HA, ainsi que les alvéoles MA-VL[4] au cours des opérations de fermeture et après leur fermeture ;
- le stockage en l’état des déchets bitumés.
Enfin, dans son avis, l’ASNR note que le calendrier de développement du projet Cigéo apparaît réaliste, à la lumière des éléments dont dispose l’Andra aujourd’hui. Les principaux jalons sont :
- un début des travaux de terrassement prévu en 2028 ;
- un début des creusements des liaisons surface-fond à l’horizon 2035 ;
- la construction des bâtiments nucléaires à l’horizon 2040 ;
- le creusement des premiers alvéoles MA-VL à l’horizon 2040 puis des premiers alvéoles HA à l’horizon 2045 ;
- la mise en service de l’installation, limitée à la phase industrielle pilote, à l’horizon 2050 ;
- une phase de démantèlement et de fermeture à l’horizon 2150.
Afin de définir un jalon réglementaire intermédiaire préalablement à la mise en service de l’installation, limitée à la phase industrielle pilote, à l’horizon 2050, l’ASNR considère nécessaire que l’Andra transmette une mise à jour de la version préliminaire du rapport du sûreté de l’installation au plus tard dix ans après la publication du décret d’autorisation de création, dans l’hypothèse où celui-ci serait délivré. Cette mise à jour devra intégrer les éléments identifiés au cours de l’instruction relevant de cette échéance, ainsi que les avancées et le programme d’études relevant d’échéances ultérieures.
Comment a été construit l’avis de l’ASNR ?
L’Andra a déposé auprès du ministère de la transition énergétique, le 16 janvier 2023, la demande d’autorisation de création (DAC) d’une installation de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde dénommée Cigéo.
Le dossier déposé par l’ANDRA fait suite à plusieurs décennies de travaux préparatoires de recherche et développement, qui ont fait l’objet de nombreuses expertises et de plusieurs prises de position de l’ASN[5] et de l’ASNR. Il répond également à des dispositions législatives, notamment la loi du 28 juin 2006 qui prévoit que « les déchets radioactifs ultimes ne pouvant pour des raisons de sûreté nucléaire ou de radioprotection être stockés en surface ou en faible profondeur font l'objet d'un stockage en couche géologique profonde ».
Pour en savoir plus, voir sur le site de l’ASNR :
L’ASN a été saisie par le ministère de la transition énergétique en mars 2023 pour conduire l’instruction technique de cette demande et émettre un avis. Elle a saisi l’IRSN pour conduire une expertise de l’ensemble des pièces du dossier, ainsi que son groupe permanent d’experts pour les déchets (GPD) afin qu’il examine également ce dossier. Cette expertise a été organisée selon trois thèmes : les données de base retenues pour l’évaluation de sûreté de Cigéo, la sûreté en phase d’exploitation des installations de surface et souterraine et la sûreté après fermeture. A l’issue de l’examen de chacun de ces thèmes, l’IRSN (puis la direction de la recherche et de l’expertise en environnement de l’ASNR) et le GPD ont rendu leurs rapports d’expertise et avis sur le dossier déposé par l’Andra. Chacune de ces phases d’instruction a fait l’objet d’une note d’information publiée par l’ASN puis l’ASNR.
Pour en savoir plus, consulter les notes d’information
- GP1 - Première réunion du groupe permanent d’experts pour les déchets relative à l’examen de la demande d’autorisation de création de Cigéo
- GP2 - Le groupe permanent d’experts pour les déchets émet ses recommandations sur la sûreté de Cigéo en phase d’exploitation
- GP3 - Recommandations du GP Déchets sur la sûreté à long terme de Cigéo en phase d’après-fermeture
A l’issue de l’instruction technique de ce dossier, qui s’est déroulée de 2023 à 2025, l’ASNR rend son avis sur ce dossier, conformément aux dispositions de l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement.
Dans le cadre du développement de sa politique de dialogue avec la société, l’ASNR a souhaité mener une consultation spécifique pour recueillir les commentaires et les questions des parties prenantes sur son avis, lors de sa phase d’élaboration.
Cette démarche, qui s’est tenue du 3 octobre au 6 novembre 2025, est venue clore un continuum de participation de la société civile sur les phases de saisine, d’expertise et d’instruction de l’ASNR. Elle visait également à apporter aux parties prenantes des éléments utiles pour participer au processus de décision sur cette demande et notamment pour jouer pleinement leur rôle dans la perspective des consultations réglementaires à venir, en particulier l’enquête publique. La consultation, lancée le 3 octobre par une réunion de présentation de l’avis de l’ASNR, a permis de recueillir une quinzaine de contributions. Elle s’est achevée le 6 novembre par une journée de restitution permettant aux parties prenantes de présenter leurs contributions et à l’ASNR de préciser les modalités de prise en compte de ces contributions dans son avis.
Lors de cette consultation, les parties prenantes ont notamment exprimé des préoccupations relatives à l’acquisition de la démonstration de sûreté vis-à-vis de certains enjeux, tels que les scellements, la gestion des déchets bituminés, ou la maîtrise des risques d’explosion et d’incendie, à l’inventaire susceptible d’être autorisé, au suivi des engagements pris par l’Andra, aux futures opportunités de dialogue lors des différentes phases de développement et d’autorisation du projet, ainsi qu’aux conditions de déroulement de l’enquête publique.
Les contributions reçues dans ce cadre ont été prises en considération par l’ASNR pour la finalisation de son avis.
La synthèse de cette consultation ainsi que l’ensemble des contributions reçues par l’ASNR sont publiées par l’Autorité, concomitamment à cet avis.
En savoir plus :
[1] Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs
[2] Déchets de faible activité à vie longue
[3] Déchets de haute activité
[4] Déchets de haute et moyenne activité à vie longue
[5] Autorité de sûreté nucléaire, devenue ASNR au 1er janvier 2025 suite à sa fusion avec l’IRSN
Cette page vient compléter le communiqué de presse du 4 décembre 2025 :
L’ASNR publie son avis sur la demande d’autorisation de création de Cigéo